samedi 17 décembre 2016

5. [Adaptation BD/ciné] Où comment à défaut de faire des vidéos, j’écris des articles futiles

Damoiselles, damoiseaux,
Depuis quelques années j'ai un projet dans les cartons. Faire une série de vidéo sur l'adaptation de la bande dessinée au cinéma. Mais un ensemble de questions ontologiques m'ont toujours arrêté.
Déjà, pourquoi parler d'adaptation BD/Ciné ? C'quoi l'intérêt ?
Beh eh. J'sais pas. Avec le temps, y en a de plus en plus alors faut bien y poser un œil pour comprendre ce que c'est, une adaptation de BD en mouvement. Si on y regarde, le ciné et la BD ont de nombreux cousinages. Historiquement, pour commencer. Ils sont nés au 19ème siècle et n'ont pas de parents précis.

Pour le cinéma, Louis et Auguste Lumière, et Thomas Edison s'en battent la parenté (entendez, les historiens se battent pour eux). Sans compter les essais antérieurs du mouvement en image.
En bande dessinée, on considère que Rodolphe Töpffer est le papa. Mais on pourrait considérer les œuvres de William Hogarth ou la tapisserie de Bayeux comme étant également de la bande dessinée. Une très intéressante discussion entre Thierry Smolderen et Thierry Groensteen (tous les pontes théoriques se prénomment Thierry) sur la place de Töpffer est disponible ici-même.
Une tapisserie de 68 mètres racontant pleins d'histoires sur l'Angleterre, ses guerres et ses rois illégitimes. Le roman graphique du 17ème siècle.
Ensuite, pendant un long moment, la BD comme le cinéma n'ont jamais été considérés comme de réels "arts majeurs", avec des langages qui se créent peu à peu.
Également, le cinéma et la bande dessinée sont des formes d'expressions artistiques qui associent les images en séquences. D'aucun compare la pellicule à une bande dessinée (ce qui pourrait réduire la bande dessinée à une étape du cinéma, si on se disait que comparer un texte de théâtre à un scénario pour le cinéma serait réduire le théâtre à une étape du cinéma). Bien évidemment, les langages du cinéma et de la bande dessinée différent beaucoup, mais se nourrissent l'un l'autre. Les sœurs Wachowski sont imprégnées de culture comics, ce qui peut se ressentir dans plusieurs plans de leurs films. Et sans champ/contre-champ cher au septième art, son collègue du neuvième serait amputé de beaucoup. (Je prends des exemples au hasard mais on pourrait parler de Machine qui rêve de Tome, Janry et Stuf, ou de Alejandro Jodorowski. Ou plus encore.)
Pour The Matrix, le storyboard a été beaucoup plus soigné qu'un film lambda. Et ça se ressent sur l'image filmée : des noirs d'encre de chine et une netteté malgré la profondeur.
Mais y a un grand nombre de différence avec le cinéma. Les cadres, le multi-cadre, les coûts... Et surtout, le cinéma est un art qui dispose l'espace dans le temps, alors que la bande dessinée dispose le temps dans l'espace. (C'beau hein. Vous comprenez pas ? Attendez j'explique après.)
Ça pourrait paraître logique, mais au cinéma, le film a une durée, alors qu'en bande dessinée, l'album a une distance (qui se compte en nombre de pages généralement). Du coup dans un album, on joue avec le temps par rapport à l'espace disponible, et dans un film, on joue avec l'espace par rapport au temps disponible. (Ce qui n'empêche pas auteur et réalisateur d'essayer de faire l'inverse.)
Et c'est les différences qui m'intéressent. Comment un réal décide d'adapter une séquence de BD au cinéma ? Doit-il rester très proche du matériel d'origine ou en capter le suc pour en redéfinir les problématiques du format ? Comment décide-t-il ? Que décide-t-il ? Est-ce un choix pertinent ?
Tes questions elles sont bien belles, mais est-ce que ça sert pas un peu à voir comment le cinéma, média de masse et populaire, révèle la façon dont la société voit la bande dessinée, média de masse et populaire, et donc les lecteurs et auteurs, via la façon de traiter le matériel d'origine ?
Mais c'est que les questions deviennent de plus en plus technique, dites !
C'est bien possible que la réponse soit : oui. Au final, comment savoir si un objet culturel est intégré dans la société, et de quelle manière il l'est ?

J'ai toujours pensé que la bande dessinée n'était plus si dévalorisée. Personne dans mon entourage n'a jamais méprisé ce média, tout le monde paraissait même encourageant lorsque je disais vouloir prendre cette voie, et mieux, tout le monde en lisait ! Quand, tout à coup, suspense, je rencontre une personne qui, découvrant le fait que je fasse des études de bande dessinée, me demande : "mais, tu n'as jamais lu de roman ?" Abasourdi, je n'ai jamais pu répondre correctement, et j'en ai encore un certain dégoût.
Jochen Gerner nous apprend à classer la bande dessinée dans la littérature.
Cool ton histoire, mais ça sert à argumenter quoi ?
C'était juste histoire de dire que si tu ne regardes que dans ton entourage, tu risques pas de savoir comment est ancré la BD dans le monde. (Humour.) (Parce qu'on encre aussi une BD.) (Non ?) Alors prendre un média cousin qui cherche à la transposer dans son propre langage, c'est une façon de savoir comment on la considère. Est-ce fait de façon puérile, sérieuse, mal dégrossie, totalement transformée ?
Grossièrement t'es un fan de Crossed et tu veux faire pareil du coup tu changes simplement "jeu vidéo" par "bande dessinée".
Crossed, une émission qui apprend à voir un film et à dessiner des sphinx d'Egypte.
Eh, tu connais Crossed ? Ça te dit on se les refait tous en attendant la fin de Chroma ?
OK !
OK !

Mais du coup tu commences quand et par quoi, ton projet ? Marvel ou DC ?
On commence sous peu, en vrac, et franco-belge.